Ancré dans l’Histoire…
En France, le mot « gouvernance » est lié à l’Histoire du pays. Associé à l’Ancien Régime (période de l’histoire de France allante de la Renaissance à la Révolution Française), « governance », orthographe du vieux français, est abandonné au profit de « gouvernement ».
Cet abandon lui permet de retrouver ses racines. En effet, le mot est un dérivé de « gouverner », issu du latin « gubernare », emprunté du grec « kubernâo ». Notons que ce même mot grec est utilisé dans sa racine commune « kubernêtikê » pour désigner le pilotage d’un navire. Les termes connus de « gouverne », « gouvernail », « gouvernement » partagent la même étymologie commune avec le terme « cybernétique ». Ces partages de racines permettent d’appréhender toutes les notions de systèmes, et donc par logique, les notions d’organisation, de gestion et de direction.
Ainsi, au fil des siècles, le mot « governance » prend tour à tour, plusieurs sens. Il a désigné la charge domestique de la gouvernante (1450), puis des territoires comme l’Artois et la Flandre (1478). Le mot devient « gouvernante » pour désigner la personne qui s'occupe de l'éducation d'un enfant (1534), puis d’un célibataire (1690).
Dans les années 1700, alors que l’administration anglo-saxonne assimile le terme de « governance » à la gestion des systèmes publics, le « new public management » ; la France s’autorise seulement l’emploi du mot « gouvernement ».
Guerre de territoires pour un mot commun…
Après la seconde guerre mondiale, les anglo-saxons, tout comme certains pays scandinaves (Suède et Finlande, notamment), utilise le mot « governance » pour leurs politiques de management public. Cette doctrine de gouvernement s’appuie sur le recours aux agences ou à des autorités administratives indépendantes pour « gérer » leurs territoires.
Il faut attendre 1970, pour que ce mot entre dans le monde anglo-saxon de l’entreprise par le biais de l’expression « corporate governance » (« gouvernance d’entreprise »).
Vingt ans plus tard, le mot apparaît en France. Dans un premier temps, il est utilisé dans les très grandes entreprises, à vocation internationale, dans son expression d’origine ; puis très vite les discours utilisent le mot « gouvernance ».
De la difficulté de définir la gouvernance…
Ces grandes entreprises s’affichaient de ce terme pour désigner un mode de gestion fondé sur l’articulation entre le pouvoir des actionnaires et celui de la direction. Cette signification demeure, seulement, elle n’est pas unique pour les entreprises. Il existe des multiples gouvernances, selon les types d’acteurs impliqués dans la prise de décision dans l’entreprise.
Toute la difficulté de définir la « gouvernance », et lui donner un sens, réside dans la référence aux acteurs impliqués et de leur mode d’interaction.
La gouvernance, un mot à usage multiple…
La gouvernance est un terme complexe à aborder. Normal ! Il est toujours difficile de catégoriser, de classer, d’évaluer ce que veut exprimer le mot. Derrière les notions de pouvoir, de vouloir et d’avoir, il est difficile de bien cerner les interactions de chacun des acteurs et de définir le système mis en place. Car, dans les configurations d’aujourd’hui, ce n’est plus un système, mais des systèmes reliés entre eux. Conséquence : la controverse s’invite sur le mot et sur sa perception !
Les anglo-saxons, souvent plus pragmatique que les latins, sous-entendent dans l’emploi du mot, la notion de « bien gouverner ».
Pour un anglo-saxon, notamment chez les étatsuniens, « bien gouverner » c’est « bien décentrer ». Décentrer, c’est déjà aborder la notion de partage. Décentrer, c’est remettre en question le système et la logique des systèmes. Décentrer, c’est mettre en mouvement, entre des acteurs choisis, des éléments indispensables aux systèmes de entreprise : stratégie, prise de décision, et évaluation.
En agissant ainsi, la gouvernance serait un mode de navigation, où l’implication de plusieurs acteurs serait une des clés du succès, contrairement aux systèmes classiques où seuls les acteurs propriétaires de l’entreprise ou le dirigeant seraient au cœur du système.
Une forme de système, ou un système de formes ?
Aujourd’hui, la gouvernance est une des formes de système d’entreprise. la gouvernance n’est pas un concept, du tout ! Plus de souplesse et plus collaborative, la gouvernance impose une normalisation plus souple, une régulation de solutions qui puisse satisfaire les ouvertures tant fonctionnelles qu’opérationnelles.
Cependant, on peut se poser la question : les systèmes de formes d’entreprises suffisent-elles à comprendre que la « gouvernance » soit l’exemple ?
A force de modeler les processus, les directives, il reste difficile pour les entreprises de se diriger vers des notions établies et filaires de la gouvernance. De fait, la gouvernance n’est pas normable, cela sous-entendrait de normer des systèmes linéaires, ce qui – nous le verrons plus loin – vient en contrepied au progrès et à l’avenir de nos entreprises.
A la manière de…
D’un point de vue pratique et pragmatique, la gouvernance est pourtant simplement une manière, une façon de faire (ou de ne pas faire). Ainsi les acteurs désignés s’imposent ou imposent une relation interactive dont ils auront dessinés les contours.
Les dirigeants progressistes reconnaissent que les approches classiques de l’entreprise ne suffisent plus au 21ème siècle. Le paradigme organisationnel hiérarchique de commande et de contrôle des deux derniers siècles, est en passe d’être remplacé par un schéma de « gouvernance » moins pyramidal, plus collaboratif.
De la gouvernance à l’autogouvernance…
Tous les parcours ne sont pas linéaires : qu’il s’agisse de l’apprentissage, de l’évolution d’une organisation, ou simplement de la vie ! Le monde d’aujourd’hui est interdépendant. L’activité professionnelle n’est plus seulement une activité en tant que telle, mais elle s’assimile de plus en plus à la vie. Cette vie qui est à la fois sociale et personnelle. Et la linéarité alors n’a plus sa place dans un tel schéma.
Demain, le schéma de la gouvernance laisserait-elle place à l’autogourvernance. Pour réussir et progresser, les acteurs accepteront d’autres logiques…