En octobre 2012, le cabinet anglo-saxon de conseil en marketing FutureBrand a publié son huitième classement des pays possédant la meilleure image de marque. Des consultants, originaires d’une vingtaine de pays, tous spécialistes du brand marketing ont évalué 118 pays en définissant la perception de leur image de marque. Pour ce faire, FutureBrand a synthétisé les avis de 3.600 leaders d’opinion ainsi que d’un collectif constitué d’experts en mondialisation, politique gouvernementale et médias. Pour faire la différence et classer les pays, cinq facteurs clés sont analysés. Le premier concerne le système des valeurs sociales (qui inclue la liberté politique, la qualité de l’environnement, la stabilité des lois, la tolérance et la liberté de parole). Le second prend en compte la qualité de vie (soit le système éducatif, celui de la santé, le niveau de vie, la sécurité et l’emploi). L’attrait économique est aussi décrypté (avec le climat pour l’investissement, l’environnement technologique, les aspects légaux et de régulation ainsi que la qualité de la main d’œuvre). L’héritage historique et culturel est aussi pris en considération (avec l’histoire, l’art, la culture et la beauté de la nature). Enfin, le dernier facteur clé pris en compte est la qualité générale du tourisme et son niveau de développement dans le pays analysé.
FutureBrand relève qu’« une bonne image de marque nationale pour un pays représente plus que la somme de ses caractéristiques. Elle a pour vocation d’améliorer la qualité de vie de ses habitants ».
Force est de constater que sur les 25 marques de pays apparaissant dans le classement, 11 sont européennes. Imaginez onze drapeaux européens dans le visuel situé en page 5, aux côtés de chaque pays… ! Impensable car nous aurions pu assimiler cette adjonction à un label. Et l’Europe, vous en conviendrez, n’est certainement pas un label ! Quoique ! Ces derniers temps, dans de nombreux discours, la marque Europe est malmenée au point de se comporter comme une garante, une caution, un label...
Dans ce classement FutureBrand, la Suède est la première marque nationale européenne, suivie de l’Allemagne, de la Finlande, la Grande-Bretagne et le Danemark. La France perd 4 places, par rapport à 2011, et devance sur sa 13e place, l’Italie, l’Autriche, les Pays-Bas, l’Espagne, l’Irlande et l’Islande.
Toqué de PIIGS, cet acronyme péjoratif qui identifie dans le monde économique les cinq pays qui ont des économies faibles, Portugal, Italie, Irlande, Grèce et Espagne : ces marques nationales ne sont pas tant en déclin que cela. Ainsi, alors l’Italie se classe au 15e rang et l’Irlande au 21e, sur 118 pays analysés, l’Europe en crise, ne se porte pas si mal.
Bien que la Suisse ne soit pas intégrée à l’Europe des 27, ce pays européen prend la tête du classement des nationalités possédant « la meilleure image de marque dans le monde », détrônant le Canada, qui passe second. La Suisse évoque une marque exceptionnellement bien perçue, avec une tendance croissante puisque la Suisse ne figurait pas dans le top 10 il y a trois ans.
Derrière la Suisse et le Canada, on trouve ainsi le Japon (3e), qui devance la Suède, la Nouvelle-Zélande, l’Australie, l’Allemagne et les Etats-Unis. La France cède quatre places mais se maintient en 13e position dans un contexte pourtant difficile. Les pays nordiques sont bien représentés avec quatre pays classés parmi les douze premiers. Les Pays-Bas affichent la plus forte progression (plus cinq places) en se classant à la 18e place, tandis que l’Italie et l’Espagne cèdent cinq places pour se retrouver respectivement 15e et 19e du classement.
Dans l’étude, les pays africains brillent par leurs absences, tout comme les pays des révolutions arabes. Normal… Des pays comme l'Inde et la Chine mériteraient certainement d'être à l'avenir dans le top25, ils ont du mal à parvenir au sommet sans tenir compte des perceptions et réalités (droits de l'homme, la corruption politique, la qualité de vie, etc.).
Dans la catégorie « marques de pays en déclin », les États-Unis, que les auteurs de l'étude qualifient néanmoins de marque iconique, glissent au huitième échelon. La Russie et la Syrie ont également connu de remarquables chutes et sont désormais respectivement 83e et 111e.
Pour revenir au classement 2012, il est intéressant de se pencher un instant sur le pays lauréat de l’année, la Confédération helvétique. La Suisse et l’Europe ont signé au fil des ans quelque 120 accords bilatéraux qui réglementent leurs relations. Cependant, ces dernières sont assez tendues avec l’Union Européenne. La Confédération n’entend pas adhérer à l’Europe communautaire, le peuple suisse y est farouchement opposé, mais Berne souhaite avoir un pied à l’intérieur tout en demeurant en dehors du système.
La Suisse réclame un droit de codécision sur les modalités de la construction européenne. Une attitude qui agace souverainement les 27. Bruxelles, au contraire, exige de la Suisse, si elle veut se rapprocher davantage du marché commun, qu’elle reprenne sans exception l’acquis communautaire. C’est donc à prendre ou à laisser. A ce jour, seuls trois des six cantons romands (Fribourg, Neuchâtel, Jura) sont favorables à l’adhésion à l’UE. Notons que le Jura Suisse est une République indépendante dans le système confédéral suisse et que ce canton est quasiment aussi européen que les membres de l’Union européenne.
Dans le contexte actuel de la crise, l’image de marque de la Suisse peut-t-elle « servir » les pays membres, et par ricochet l’image de l’Europe ?
Partagée entre « ressembler » aux Etats-Unis d’Amérique et se « rapprocher » de la Chine, l’Europe en oublierait-elle ses valeurs ? Affirmées pour la première fois par le traité sur l’Union européenne,signé à Maastricht en 1992 et complété par le traité d’Amsterdam (1997), les valeurs de l’Union sont précisées par le traité de Lisbonne (2007).
Ainsi, l’Europe a tout d’une grande marque… Une histoire, un espace, un territoire, une identité, des valeurs, un logo… La seule chose qui semble lui faire défaut, depuis trop longtemps, est la voix de la marque Europe. Quel est donc son(sa) porte-parole ? Dans une Europe en crise, il serait nécessaire d’apprendre à faire parler sa marque par une seule et même voix, non un chœur de 27 voix !
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